Le cancer apparaît souvent quand certaines cellules de notre corps cessent de fonctionner normalement et commencent à se multiplier de façon incontrôlée. Ce dérèglement est souvent causé par des mutations dans l’ADN des cellules.
Les plus récents résultats d’un projet de recherche portant sur les défauts métaboliques et la structure des télomères, réalisé par Florence Couteau et Laurence M. Gagné, membres de l'équipe du Pr Frédérick A. Mallette, chercheur au CR-HMR, viennent d’être publiés dans Nucleic Acids Research.
Cet article nous apprend que dans certains cancers, comme les gliomes de bas grade (un type de tumeur au cerveau) et les leucémies myéloïdes aiguës, on retrouve fréquemment des mutations dans deux enzymes appelées isocitrate déshydrogénase 1 et 2 (IDH1 et IDH2). Ces mutations sont présentes chez plus de 70 % des personnes atteintes de gliome de bas grade, et dans environ 20 % des cas de leucémie myéloïde aiguë. Elles apparaissent tôt dans le développement du cancer.
Ces mutations transforment le rôle normal des enzymes. Au lieu de participer au métabolisme cellulaire habituel, elles fabriquent une molécule anormale : le R-2-hydroxyglutarate. Cette molécule est appelée un oncométabolite parce qu’elle perturbe le fonctionnement de la cellule et peut favoriser le développement du cancer. En particulier, elle interfère avec certaines protéines qui régulent l’ADN.
Les recherches du Pr Mallette ont montré que le R-2-hydroxyglutarate pourrait aussi endommager les télomères, c’est-à-dire les extrémités protectrices de nos chromosomes. Les télomères jouent un rôle essentiel : ils protègent l’ADN lors de chaque division cellulaire. S’ils sont trop abîmés ou raccourcis trop rapidement, cela peut entraîner des anomalies graves dans l’ADN et favoriser le développement du cancer.
L'approche
Pour mieux comprendre les effets de l’oncométabolite, ils ont utilisé deux types de cellules
• des cellules contenant directement les mutations IDH1 ou IDH2;
• des cellules normales exposées au R-2-hydroxyglutarate.
Ils ont observé les cellules au microscope pour analyser l’état des télomères (s’ils étaient fonctionnels ou abîmés) et pour voir comment l’ADN se répliquait à leur extrémité.
Ce qu’ils ont découvert
Les résultats montrent que :
• Les mutations IDH1 et IDH2, ainsi que l’exposition directe au R-2-hydroxyglutarate, causent des dommages aux télomères.
• Ces dommages sont en partie causés par une réplication inadéquate de l’ADN au niveau des télomères.
Pourquoi c’est important
Les gliomes de bas grade sont souvent difficiles à traiter avec les approches actuelles. En découvrant ce nouveau mécanisme — un lien entre les mutations IDH, l’oncométabolite, et les dommages aux télomères —, cette étude ouvre la voie à de nouvelles stratégies thérapeutiques mieux ciblées.